12 Septembre 2025
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La FNDIRP a demandé, début 2023, à la ville de Conflans Ste Hne d'apposer une plaque commémorative sur le dernier domicile connu des conflanais morts en déportation parce que juifs soit Isaac Pournik, Robert Blasberg, la famille Frajenberg.
En septembre 2023, nous avons obtenu l'autorisation d'apposer une plaque commémorative sur le 4 avenue de Bellevue, adresse où vivait Isaac Pournik.
Par contre, le conseil municipal de décembre 2024 nous a refusé l'autorisation d'apposer une plaque commémorative sur le dernier domicile connu de Robert Blasberg ainsi que sur celui de la famille Frajenberg. La ville de Conflans souhaite non pas apposer des plaques commémoratives mais sceller des pavés de mémoire devant le dernier domicile connu des conflanais morts en déportation parce que juifs.
La famille Frajenberg, le propriétaire du 7 rue Maurice Berteaux où vivait Robert Blasberg n'ont pas été, au préalable, consultés sur le choix du mode de commémoration. Ils ont été mis devant le fait accompli, ce qui n'est pas digne.Ils doivent avoir le choix du mode de commémoration, selon nous.
Pour en terminer, le Mémorial de la Shoah, la Fondation pour la mémoire de la Shoah ne sont pas favorables à ces pavés de mémoire.Interrogé par la FNDIRP de Conflans, le Mémorial de la Shoah, par le truchement de Mme Arnaud Elise, responsable du Service des Activités culturelles nous a communiqué ses positions sur les pavés de mémoire.
Autant de réserves à apporter à la décision prise en décembre 2024 par le conseil municipal de Conflans de choisir les pavés de mémoire et non pas les plaques commémoratives
Jean Présent, Fédération Nationale des Déportés Internés Résistants et Patriotes
Après consultation de mes collègues responsables des lieux de mémoires voici ce que je peux vous répondre.
La position du Mémorial de la Shoah sur les Stolpersteine a fait l’objet d’un texte de référence de notre Institution il y a quelques années, en réponse à un questionnement de la Ville de Paris. Ce texte demeure toujours d’actualité et pourrait nourrir la réflexion de la FNDIRP comme de la ville de Conflans.
« Le projet des stolpersteine est né en Allemagne, pays où la population juive d’avant-guerre a majoritairement disparu, chassée et exterminés par les nazis. Mais ce qui est valable pour l’Allemagne ne peut être plaqué sans réflexion sur la France et en particulier Paris.
La France a une autre histoire, en particulier celle de la construction de la mémoire, et une autre tradition, celle des plaques et des monuments aux morts.
Dans une ville comme Paris, tous les Maires, quelle que soit leur étiquette ont toujours répondu positivement aux demandes des associations, notamment celles des fils et fils des déportés juifs de France, animée par Serge et Beate Klarsfeld ainsi que les Amejd (association pour la mémoire des enfants juifs déportés) afin de mémorialiser la persécutions des Juifs Parisiens pendant la Seconde Guerre mondiale. Ainsi à ce jour des dizaines de plaques font déjà partie du paysage de notre quotidien. Toutes les écoles primaires parisiennes portent une plaque extérieure et intérieure relatifs aux enfants qui fréquentaient cette école et qui ont été arrêtés et déportés. Dans chaque arrondissement un monument dédié aux enfants existe dans un jardin public désigné.
Des noms de rue, des places, des établissements scolaires portent aussi cette histoire.
Au Vel d’hiv, un monument et un jardin dédié aux enfants a été inauguré en 2017. De nombreux lieux d’arrestations comme le Gymnase Japy, l’Ecole Militaire, l’ancienne prison des Tourelles portent une plaque. Les gares également. Des plaques honorant la mémoire de résistants ou de déportés sont légion, Simone Veil, Anne Frank, Jan Karski, Joseph Epstein, Marcel Rayman, Marceline Loridan Ivens, Mila Racine, Pierre Kauffmann, la place des 260 enfants déportés de l’école de la rue des hospitalières Saint-Gervais. Mais plus encore il existe une médiathéque Hélène Berr, une piscine Alfred Nakache, tous deux déportés de France…, Enfin au Mémorial de la Shoah existe une « allée des Justes » et un mur où sont gravés les noms des 76 000 Juifs déportés de France. Je vous renvoie aux livres de Sarah Gensburger et de Philippe Apeloig qui rendent compte de la très grande diversité des plaques et des lieux dédiés à la Shoah à Paris.
Par ailleurs, ces pierres au sol posent problème. Les détritus, les déjections canines, le fait de marcher sur ces pierres choquent beaucoup d’entre nous. La plaque au mur est plus digne au regard du sujet.
Enfin le travail de Serge Klarsfeld nous donne une véritable cartographie des arrestations et des déportations, beaucoup plus qu’une simple pierre. Nous avons pour la France un Mémorial de papier, le Mémorial de la déportation de Serge Klarsfeld et de Pierre, celui qui se trouve au Mémorial de la Shoah, qui rendent compte de la dimension du génocide.
Enfin les Juifs de France sont toujours vivants et sont même plus nombreux qu’avant-guerre. L’apposition de ces pierres risque de faire l’effet inverse et de discriminer une population qui vit parfois dans les mêmes quartiers que leur famille persécutée et assassinée.
Pour toutes ces raisons le Mémorial de la Shoah, mais aussi les FFDJF et la Fondation pour la mémoire de la Shoah vont poursuivre ce travail de mémorialisation dans la tradition de notre pays et surtout vont s’attacher à faire vivre ce patrimoine exceptionnel, ces milliers de plaques et de monuments par des projets éducatifs, préoccupation essentielle aujourd’hui dans le contexte que connait notre pays. »